10 févr. 2014

En forme de point d'interrogation

Voilà, comme la dernière fois je vous avais promis d'en parler, j'en parle aujourd'hui. Il s'agit d'une interrogation qui me taraude depuis quelques mois, si ce n'est depuis quelques années. Pas une grande question philosophique ni le plus extravagant des dilemmes, loin de là. Seulement un questionnement bien légitime de la part d'une personne qui a toujours vécu avec son imagination.
Donc, voici la question : comment perçoit-on la vie lorsqu'on est dépourvu d'imagination ?
Je m'explique. Il existe une foule de méthodes pour s'exprimer, que ce soit par l'écriture, le chant, la danse, ou tous les arts visuels. Bien qu'on dise que tout le monde a une part d'artiste en lui, il serait absurde de prétendre que tout le monde l'exploite. Ainsi, cela signifie que des gens vivent sans jamais rien construire, sans jamais rien s'imaginer. Moi, par exemple, mon esprit créatif est pratiquement sans arrêt susceptible d'être stimulé. Un décor, un paysage, un tableau, une phrase, une chanson ou un rêve font partie de mes multiples sources d'inspiration. À partir de ces interrupteurs qui enclenchent mon imagination, la machine s'emballe et je peux commencer à créer. Je n'ai pas à y songer, il s'agit d'un réflexe ancré au plus profond de moi. Il me serait impossible de m'en départir, même si pour une raison ou une autre je devais cesser l'écriture. L'imagination, elle, ne partirait jamais.
Mais pour ceux qui n'ont jamais acquis ce réflexe, que diable peut-il se passer dans leur tête ? Comment fait-ton pour ne jamais être inspiré ? J'ai beau essayer de toute mes forces, je suis incapable de me figurer mon existence sans tous ces éléments déclencheurs qui me titillent sans arrêt. Les rêves sont souvent mon inspiration, mais qu'en est-il des gens vides de créativité ? Ils ressortent de leur sommeil et se remémorent leurs rêves, des rêves stériles qui s'oublieront ou pourriront simplement dans la mémoire. D'ailleurs, ces gens-là rêvent-ils d'autres choses que d'eux-mêmes et des gens qu'ils connaissent ? Rêvent-ils à des mondes inexistants, à des intrigues ressemblant étrangement à la trame d'un roman ? Rêvent-ils d'un univers qui n'est pas le leur ? Interprètent-ils, lors de ces rêves, des personnages qui ne sont pas eux ? De mon côté, parfois je suis moi, parfois je suis quelqu'un d'autre. Il m'est même arrivé d'être une vieille femme, ou un adolescent, ou une sorte de créature imaginaire ne vivant que par la glace et le feu.
Comment peut-on ressentir les atmosphères et entendre des phrases sublimes sans pouvoir en être inspiré ? C'est une question à laquelle je ne peux répondre, et j'ai beau interroger mes connaissances qui ne s'expriment par aucun moyen artistique, les réponses sont vagues. Car ces personnes-là, elles se posent parfois les mêmes questions à mon propos ; comment les artistes font-ils pour trouver l'inspiration n'importe où ?
Suis-je la seule à m'interroger à ce sujet ?
 

5 janv. 2014

Retour, homme et compagnie

D'abord, veuillez pardonner ma sempiternelle procrastination qui me tient éloignée de ce damné blogue. Quoique, je dois vous admettre qu'il ne s'agit pas uniquement de procrastination, mais aussi de manque de temps, car il m'est arrivée plusieurs choses ces derniers mois.
D'abord, étrangement, je n'ai jamais aussi peu lu de toute ma sainte existence. Au moins, quelqu'un m'a initiée à Lovecraft, alors on va dire que ça compense largement. Parce que Lovecraft, ô mon maître, m'a fait découvrir un nouveau pan d'un genre littéraire que je connaissais peu, et m'a permis d'élargir ma propre imagination.
Maintenant, il est temps d'expliquer les raisons pour lesquelles je vous ai fui (ahah, mais non, c'est pas vrai).
Alors, fait positif, j'ai écris. J'avais d'abord prévu recommencer complètement un projet datant de l'année dernière, la Doctrine de plastique. Mais, en relisant les 35 000 mots déjà écrits, j'ai réalisé que c'était bon. Et je vous jure que pour une perfectionniste qui recherche encore plus que la perfection, c'est un événement assez exceptionnel. Après quelques légères modifications et une phase de remaniement, j'ai donc poursuivi le travail de la bête. Extase totale. En plus de ce projet, je rédige présentement une nouvelle et, bien sûr, je ne délaisse pas ma très chère poésie.  
Aussi, j'ai été vachement occupée avec ma famille, depuis que nous avons pris la résolution de nous voir et de nous amuser ensemble plus souvent. On peut donc dire que mon absence était pour une bonne cause, à moins que vous considériez que ma famille est envahissante et diabolique (euh?). Et puis il y a un scoop qui s'appelle Mathieu et qui justifie pleinement mon absence de la blogosphère. Bon, vous aurez compris qu'il s'agit là d'une nouvelle relation de cœur qui m'a comme qui dirait redirigée vers d'autres priorités. C'est d'ailleurs cette personne qui m'a aidée à écrire davantage dernièrement. Il faut croire que côtoyer un artiste un peu dingue est un bon coup pour l'inspiration, surtout quand on souffre de dysfonction érec imaginative. Je suis très heureuse ces temps-ci et, dans mon cas, le bonheur ne me donne pas envie d'aller glandouiller sur Internet. Surtout qu'il faut que je lutte pour vaincre ma diantre de procrastination abusive. L'ordinateur n'est assurément pas un remède contre cette atroce maladie.
Bon, je sais que ces nouvelles ne sont pas les plus palpitantes du monde, mais après une absence aussi longue, je vous devais bien des explications ! Je vous reviendrai prochainement avec quelque chose de plus intéressant, promis. Je vais vous parler d'un truc qui me tarabuste depuis trois bonnes éternités au moins, et je ne dis pas cela pour vous intriguer ou pour vous faire languir, je ne suis pas aussi cruelle (enfin...).
Sur ce, je vous souhaite un peu un retard une excellente nouvelle année. Et si vous prenez des résolutions, de grâce, cette fois-ci, réalisez-les ;)
 

20 sept. 2013

La pluie tombe

Tu es encore là ce soir
Rien ne t’a tué, ni l’averse
Ni la foudre qui fait du ciel
Une vaste plaie lumineuse.

Les immeubles avalent l’horizon
Tu ne vois pas de l’autre côté
Tu ne vois pas les cercueils
Même s’ils sont ton lendemain.

Le réveille-matin est bloqué à minuit
Mais ça ne veut rien dire
Car si tu ne meurs pas aujourd’hui,
Tu mourras demain.

6 sept. 2013

Prologue

Comme cela fait longtemps que j'en parle, j'ai pensé à exhiber sur la place publique (hum...) le prologue des Portraits inachevés, dont je vous harcèle depuis quelques temps déjà.
Le reste, vous le lirez... quand ce sera le temps, ce qui reste d'être assez long compte tenu de ma lenteur exagérée à imprimer mon manuscrit et à "faire le grand saut" (j'espère qu'il ne s'agira pas d'un suicide...) Je profite de l'occasion pour vous demander de me donner un petit coup de pied au cul et d'agir une bonne fois pour toute. Sur ce...

Prologue

S’il devait y avoir des fantômes dans la grande maison d’Abigail, ils y seraient certainement nombreux. Il y aurait d’abord la fameuse aïeule de la propriétaire, Liliane, hideuse marâtre tuée par un mari furieux. Les excuses minables de l’époux avaient survécu aux décennies, et on se souvenait encore du moment où il avait clamé, tel un innocent devant l’échafaud, qu’il « voulait juste violenter un peu cette pauvre folle ». Venait ensuite Octave, grand idiot dégingandé, qui avait avalé un poison à rats par inadvertance dans un recoin sombre des cuisines. Sans doute la petite Béatrice n’était-elle guère mieux en terme d’intelligence, elle qui avait provoqué le molosse des voisins jusqu’à se faire déchiqueter la gorge. Le sage et le doux Isidore serait sans conteste le spectre le plus calme, souvenir translucide d’un homme tuberculeux étendu sur son lit, toussant ses derniers souffles de vie. Il ne fallait pas oublier les jumeaux mort-nés, horriblement malformés, et leur mère, Clarisse, malheureuse femme dont l’époux avait convolé trois mois plus tôt avec une voluptueuse étrangère. Grace rejoignait la triste Clarisse esseulée, Grace qui était elle aussi morte en couches en mettant au monde un adorable bambin du nom de Blanche. Le fantôme le plus jeune serait justement cette Blanche, disparue à quatorze ans au pied de l’escalier de la tour centrale.

Les esprits de quatre générations vagabonderaient dans la même maison, chacun préférant ses couloirs et ses pièces, chacun rêvassant aux lointains jours de vie. La terrifiante Liliane protégerait sans doute jalousement son territoire, grognant et griffant ceux qui tenteraient de s’y infiltrer. Octave s’agenouillerait devant le pot de mort-aux-rats en se demandant pourquoi il était mort et pourquoi il ne pouvait plus ni sentir ni goûter les plats si savoureux de sa grosse tante. Béatrice errerait dehors, distraitement assise sur la clôture séparant la lande des cours voisines, grimaçant aux chiens dans l’espoir de se venger de leur cruauté. On entendrait les toussotements spectraux d’Isidore au bout des corridors, silhouette cherchant une âme à consoler, une peine à écouter. Clarisse pleurerait dans la chambre où elle était décédée, regardant avec désarroi et affliction les minuscules corps atrophiés de ses enfants qui vagissaient. Les gens se demanderaient où disparaissaient les draps blancs des penderies, et ce serait Grace qui les emprunterait pour en tapisser le berceau de son bébé. Les marches dans la tour craqueraient mélancoliquement au pas nostalgique de la jeune Blanche, dont les fredonnements s’évaporeraient par les fenêtres entrouvertes.

Mais les fantômes, n’est-ce pas, ne sont que le fruit des esprits troublés, ainsi n’existent-ils pas. Dans ce cas, pourquoi des pas s’impriment-ils dans la poussière là où personne n’a mis les pieds depuis des années ? Pourquoi, à l’approche des anciens appartements de l’acariâtre Liliane, entend-on des sortes de grincements de dents ? Pourquoi les draps blancs dans les penderies se froissent-ils durant la nuit ? Pourquoi les petits gâteaux se retrouvent-ils dans ce racoin enténébré de la cuisine, là où flotte une odeur de poison ? Pourquoi des sanglots résonnent-ils entre les murs alors que personne n’a mal ? Pourquoi y a-t-il toujours un malade quelque part qui crache ses poumons ? Pourquoi les chiens rôdent-ils près de la lande, les babines retroussées, attendant une victime à mordre ?

Pourquoi entrevoit-on l’éclat d’une robe vaporeuse dans l’escalier de la tour centrale, si les fantômes n’existent pas ?  

30 août 2013

À tous les fantômes qui voient minuit

Mon obsession pour la nuit et pour les fantômes ne semble pas près se calmer. Il s'agit d'une source inépuisable d'inspiration, et qui peut exprimer tant de choses. Comme cela fait longtemps que je ne vous ai pas présenté l'un de mes imparfaits petits poèmes, j'ai pensé qu'il était temps de remédier à la situation.


Je vous lègue le soleil pour contrer la lune,
Le vent pour souffler le vide,
Les arbres pour draper l’horizon,
Et l’automne pour tapisser vos tombes.

Je vous envoie des enveloppes parfumées
Remplies des pétales de jadis,
Ainsi que des vases de cristal
Dans lesquels enfermer vos pleurs.

Je vous offre des violons et des pianos,
Des voix vaporeuses de chérubins,
Des chœurs de brises printanières,
Et des lèvres pour fredonner à vos oreilles.

J’écris vos noms oubliés sur mon testament ;
Tous vos cadeaux attendent sur les quais,
Enveloppés de papier couleur d’été
Dans des boîtes à l’aspect brumeux.

À vous qui vous recroquevilliez sous le ciel
Depuis toujours dans les ténèbres ;
À vous qui souffrez minuit,
je lègue midi.

12 août 2013

Problèmes de rêves

Il m'arrive d'adorer mes rêves, surtout quand ils me refilent des idées pour d'éventuels projets.
Mais.
Il m'arrive aussi de les aimer d'une façon douce-amère. Il se trouve que je m'affaire présentement à ce que je pense être l'ultime révision des Portraits Inachevés. Du moins, je m'affairais. Pendant une semaine, j'ai été très productive : dix, vingt pages par jour. J'étais dans mon élan, encouragée, déterminée, et plutôt satisfaite de mon travail (malgré mon perfectionnisme pathologique...) Et voilà que surgit le rêve. Et un deuxième. Et un troisième, pour trois nuits de suite. Des rêves magistraux, cauchemardesques et délicieusement décousus, pour moi qui adore le mystère. Bref, trois rêves sombres et science-fictifs = du bon matériel.
Mon problème, docteur, c'est que je ne peux pas être captivée par deux choses en même temps quand il s'agit d'écriture et d'inspiration. Je suis inspirée par ça, ou par ceci, mais pas par les deux. Il est difficile, par exemple, de réviser les errances somnambulesques d'un enfant dans une sorte de chambre hantée, tout en ayant à l'esprit l'image d'une gigantesque bâtisse rouillée dans laquelle une certaine Arika/Ariane/Zarikia contrôle une machine qui fait pousser une forêt synthétique... 
J'ai beau me répéter que rien ne presse, qu'il n'y a même pas six mois, les Portraits n'étaient pas encore commencés, j'ai l'impression de gaspiller mon temps et de prendre du retard, sur une échéance qui n'existe que dans ma tête.
Mon problème, aussi, celui là d'un tout autre ordre, est que je suis une infidèle indomptable... 10 000 mots par ci, ah et puis non, je préfère un autre, 5000 mots d'un côté... mais dis donc, celui-là est plus intéressant ! Délaisser 10 000 mots, pour moi, ce n'est pas tellement déchirant. Mais en délaisser 50 000... c'est une autre affaire. Voyez, il y a un peu moins de deux mois, j'étais à fond dans un projet nommé Aüra, basé sur un rêve. Tout allait bien, mes documents d'informations étaient complets, j'avais une bonne idée de l'intrigue... Et hop, un oiseau dans le ciel attire mon attention ailleurs. Résultat : une demi-douzaine (voire plus) de romans-avortons par année...
Cela dit, je ne me plains pas. Je préfère écrire des textes sans fin que ne pas écrire du tout...
 
Maintenant, souhaitez-moi bonne chance avec mes rêves et mes cauchemars. J'espère qu'ils seront gentils avec moi.       
 

2 juil. 2013

De la part d'un rêve

Quand j'ai commencé la rédaction des Portraits Inachevés, je ne savais strictement rien de ce que je m'apprêtais à écrire. En fait, si ce n'avait été de ce rêve, une nuit, je ne me serais peut-être jamais lancée dans cette entreprise.
Au beau milieu de la nuit, je me suis réveillée avec une phrase très précise à l'esprit. Oui, une phrase. Je me suis empressée de la noter et, le lendemain, je l'enrobais déjà d'un texte. Lequel texte est devenu un premier chapitre, puis un deuxième, puis un roman.
 
C'était un édifice osseux, avec des couloirs grisâtres et tordus comme de vieilles articulations, éclairé de lampes qui frémissaient d'une lueur funèbre.
 
Je n'ai aucune mérite pour cette phrase, je dois plutôt remercier mon subconscient de me l'avoir transmise, même si c'était dans un moment où j'aurais préféré dormir. Quoique.
J'ai cousu le décor de l'histoire autour de cette phrase, et le décor m'a inspiré des personnages. Qui pourrait bien vivre dans une telle maison ? m'étais-je demandé. Ainsi sont apparus Alice, Ophélie, Blair, Casimir, Guillaume, Abigail et le petit Henri. Certains sont partis au fil de l'histoire, d'autre ont cogné à la porte. Théodore et les deux petits intrus se sont greffés aux fantômes de la maison. Mais ces personnages, que faisaient-ils ensemble, eux si différents, eux sans famille sauf cette femme glacée qui les guettait ?

Aimable petit cadeau de la part d'un rêve.