L’enfant avait 5 ans lorsqu’il cessa de vieillir.
Il était d’une pâleur translucide. Ses veines bleues pulsaient, son petit cœur battait sereinement dans sa poitrine diaphane. Ni son corps ni son souffle ne dégageait la moindre odeur. En revanche, son regard aux prunelles océaniques, lorsqu’il se posait sur les objets de son affection, se mettaient à exsuder les fleurs nouvellement épanouies, et quand il observait un être ou une situation qui était contre sa nature, un vent de soufre tournoyait, brûlant et nocif. L’enfant ne méprisait rien ni personne, ou du moins n’en avait pas conscience. Il désapprouvait grand nombre de conduites et de paroles sans véritablement en exécrer aucune. Son cœur et son âme ne ressentaient rien de tel non plus. Mais ils savaient, en humant les effluves âcres et vomitifs des haleines du Mal, qu’ils étaient confrontés à des horreurs, et qu’il fallait s’en méfier ; mieux, s’en prémunir. Ils nourrissaient le désir purificateur de rompre les cous malveillants sans pourtant les tuer. Tout cela, néanmoins, était abstrait. L’enfant dormait dans un sommeil chaste et rêveur, dans lequel des mers affolées, des brasiers frénétiques, de doux nuages et de ciels enveloppants, se superposaient et se combattaient jalousement, chacun luttant pour établir son empire. Cette procession de soldats n’avait aucun sens pour l’endormi ; il les voyait sans les cerner, sans en saisir les fondements. Sous ses paupières frétillantes, les épées enlacées claironnaient, célestes, et crachaient sur leurs ennemis sangs et venins. De petits diablotins aux visages enchanteurs se prélassaient sur la lune et tiraient vers eux les éclats tempétueux du soleil. Ils mangeaient ses rayons, les digéraient, et les expulsaient en immondices pestilentiels sur les couronnes dorées des chérubins aux faux rouillées. Ici, les anges et les démons se confondaient. Les démons arrachaient aux anges leurs robes blanches et leurs peaux laiteuses, les anges déshabillaient les démons de leurs torses couverts de lèpre et de leurs sourires ignares. Tous se volaient et se paraient de leurs larcins, déguisant leurs péchés autant que leurs miracles, costumant de loques décrépites ou de somptueux habits leur véritable nature. Qui était qui ? Quelles forces s’entretuaient, dans ces contrées sanglantes et confuses ? Quels monstres et quels séraphins se disputaient la faux et la lyre ? Pauvre enfant ! il aurait suffi de quelques années de plus pour tout comprendre.
Ne comprenant pas moi-même, je ne peux vous éclaircir sur ce point !
1 commentaire:
toujours ce monde surnaturel, intérieur, sombre et angoissant...écriture riche et explosive nonobstant votre jeune âge...
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